Représentations de la Femme

L’exploitation de la mythologie grecque dans la peinture occidentale

Les personnages féminins de la mythologie n’ont cessé d’inspirer les artistes, peintres, sculpteurs, écrivains notamment, jusqu’à nos jours. Les artistes ont éprouvé un regain d’intérêt pour l’Antiquité à la Renaissance et au XVIIe siècle. La mythologie leur permettait de mettre en valeur les passions et de montrer leurs talents de créateurs en les mettant en scène. De plus la peinture mythologique, selon les critères du classicisme français au XVIIe s., appartient au grand Genre.

Qu’est-ce que la mythologie chez les Grecs ?

La mythologie, c’est l’histoire (la fable) de dieux ou demi-dieux en interaction avec les humains. Ils ont les mêmes passions ou défauts (sentiment amoureux, convoitise, désirs, jalousie…). La mythologie grecque reflète l’humanité, ses questionnements métaphysiques, ses désirs, ses défauts, ses pulsions inconscientes.

Quelle est l’origine des histoires de la mythologie grecque ?

Les histoires de la mythologie grecque nous sont parvenues essentiellement par deux sources littéraires, La Théogonie d’Hésiode, au VIIIe s. avant notre ère (du grec, « Théo-gonie » = naissance des dieux), et les deux épopées d’Homère, au même siècle, L’Iliade (« Poème d’Ilion », c’est-à-dire la cité d’Ilion, autre nom de Troie), et L’odyssée (Ulysse, en grec, se dit « Odusseos »).

Les écrivains et poètes des siècles suivants s’en sont inspirés et ont proposé des variantes de ces histoires, comme les poètes tragiques grecs Eschyle, Sophocle et Euripide au Ve siècle avant notre ère, ou les poètes latins Virgile dans l’Enéide (29-19 avant notre ère), et Ovide, en particulier dans Les Métamorphoses (début du Ier siècle de notre ère).

Les aventures amoureuses de Zeus

Parmi les mythes qui ont retenu l’attention des artistes, on trouve les différentes aventures amoureuses du dieu des dieux, Zeus. Il utilisait des ruses pour approcher ses victimes, se transformant, en nuage, ou en taureau par exemple.

Ainsi Zeus séduit Léda, fille du roi d’Etolie et épouse du roi de Sparte Tyndare, en se métamorphosant en cygne. A la Renaissance des peintres italiens comme le Corrège, Véronèse ou Michel-Ange (dont seules des copies nous sont parvenues, parmi lesquelles celle du Rosso Fiorentino) s’emparent de cette histoire.  

Analyser une oeuvre : Le Corrège, Léda et le Cygne

Une étude d’oeuvre permet de montrer

  • les moments du mythe que les artistes ont choisi de figurer
  • la composition qu’ils ont mise en œuvre (intérieur ou extérieur, décor, lignes, couleurs, formes, lumière)
  • ici, la façon dont Léda apparaît : trompée par la ruse du dieu, victime malgré elle, ensorcelée peut-être.

Pistes d’analyse

Scène de baignade. Le cygne surprend Léda au bain (on aperçoit la rive d’un étang au tout premier plan en bas à droite), dans un paysage de nature. Au second plan, un bouquet d’arbres généreux, avec des couleurs végétales (terre de Sienne, vert rabattu mélangé à la terre de Sienne…) permet de mettre en valeur les corps laiteux du personnage féminin qui est au premier plan..

On a plusieurs représentations de Léda, à différents âges peut-être (enfance, adolescence, jeune femme) et deux servantes, mais aussi trois représentations du cygne, dans l’eau avec l’enfant, dans le giron de la jeune femme, épisode central (et centré), et envol final du cygne vers la droite (une narration circulaire, de la droite au centre puis vers la droite). Léda, à chaque fois, suit le cygne du regard.  Trois putti et un personnage masculin ailé un peu plus vieux (sans doute Cupidon), à gauche, – et donc excentrés par rapport aux trois moments dépeints du centre vers la droite-, signifient une scène amoureuse.

analyse d'oeuvre, Léda et le Cygne, Le Corrège
Le Corrège Leda avec le cygne 1531-32, huile sur toile,
152 x 191 cm Staatliche Museen, Berlin

Au centre, Léda reçoit le cygne dans son giron (entre ses jambes), le cou du cygne s’approche de sa bouche, elle a une inflexion du visage vers lui, et semble séduite (sourire, yeux baissés vers lui). Son corps est allongé à la façon de la « bella maniera », un idéal de beauté de la fin de la période renaissante. De même, les corps féminins sont laiteux (comme on l’a déjà dit), et leurs formes harmonieuses.

Le tableau est construit à l’aide de lignes obliques qui forment différents triangles, par exemple la posture de Léda au centre, mais aussi la  composition de tous les personnages, depuis les putti en bas à gauche jusqu’à la servante en rouge aux cheveux blonds, puis de cette servante à la fillette qui se baigne à gauche. Le bosquet forme quant à lui un triangle inversé qui s’élève vers le ciel. Le cygne qui prend son envol vers la droite semble n’être dans aucun triangle (ou peut-être un triangle dont le plus long côté serait le bord vertical gauche de la toile), ce qui le met en valeur.

La lumière vient de la droite, éclairant en particulier le cygne central et le corps de Léda.  Elle permet aussi de rendre visibles en partie les putti et l’amour.

Prolongements

Une ode du poète Pierre de Ronsard (Odes, III, 20) raconte l’histoire de Léda, qu’il imagine vierge encore, et appelée à enfanter non quatre enfants, mais seulement Castor et Pollux. Voir le texte

Enfin, si vous préférez mener une étude du mythe dans les arts plastiques à travers les siècles, vous pouvez consulter le site Crotos  qui recense un bon nombre d’œuvres.

Voici également quelques références :

  • Jean Thierry, Léda et le cygne, 1717, marbre, h. 81 cm, musée du Louvre, France
  • François Boucher, Léda et le Cygne, 1742, Collection privée
  • Paul Cézanne Léda et le Cygne,  1880, Barnes Foundation, Philadelphia, USA
  • Leon Chwistek (1884–1944), Léda et le Cygne, Dessin à l’encre- musée national de Varsovie, Pologne